Akira (1988) * * * * *

Dans l’animation japonaise, il y a un avant et un après Akira. En effet, Akira a grandement contribué à faire connaître la culture manga dans le monde entier avec un film très abouti, une animation fluide et une histoire complexe et mature, réalisé par Katsuhiro Otomo, l’auteur du manga original. Sorti au Japon en 1988, puis au Etats-Unis en 1989, il faudra attendre 1991 pour avoir une version en français. Etant fan du Club Dorothée à l’époque (c’était encore la période « mangas », avant les infâmes séries AB Productions), je rêvais de voir ce film, ayant vu quelques extraits à la tv (pas d’internet à l’époque).

 

Une claque encore de nos jours, et vous ne voyez pas la qualité de l’animation sur la photo…

Enorme coup de chance, lors des vacances d’été à Barcelone en 1992, Akira sort au cinéma (je précise au cas où mon pseudo n’est pas assez éloquent que je parle couramment espagnol) ! Une seule salle le diffuse, mon frère et moi, on tanne nos parents pour aller le voir, on y a accès et là, la claque !

 

C’était une révolution, jamais un anime n’avait eu un graphisme aussi somptueux avec une telle qualité d’animation, c’était carrément du jamais vu ! Et 31 ans après, cela n’a pas pris une ride, il reste toujours aussi spectaculaire. L’ayant revu pour faire la chronique, j’ai même découvert certains détails qui m’avaient échappés lors de précédents visionnages. Et je ne parle même pas des thèmes abordés dans l’anime, bien plus profond qu’il n’y parait et qui méritent eux aussi 2-3 visionnages afin d’assimiler tout ce que le film a à offrir.

 

Tokyo juste avant sa destruction. Et oui, c’est un dessin!!!

 

L’histoire débute le 16 juillet 1988 (le jour de la sortie du film au Japon). Une immense explosion détruit complètement Tokyo et déclenche la troisième guerre mondiale. 31 ans plus tard, en 2019, on découvre la ville de Neo-Tokyo, une mégalopole bâtie sur les ruines de l’ancienne Tokyo. Elle est gangrénée par le chômage, les émeutes, la violence, la corruption et parcourue par des bandes de motards désoeuvrés.

 

Un soir, dans un bar sordide où l’on vend des amphétamines, un jeune s’approche de quelqu’un accolé au juke-box et il lui dit « On a cerné les Clowns ! ». Les Clowns, c’est une bande de motards rivaux et la personne accolée au juke-box, c’est Kaneda, le chef de la bande des Capsules.

 

Se rendant à sa moto, on trouve Tetsuo, qui rêve de conduire la moto de Kaneda. Tetsuo, c’est un peu le petit frère, un adolescent timoré jugé comme le plus faible et inexpérimenté de la bande. Bref, Kaneda enfourche sa moto et toute la bande part affronter la bande des Clowns dans les rues de Neo Tokyo. Autant dire que l’affrontement est violent.

 

 

 

 

 

 

 

Au même moment, alors que des émeutes ont lieu, un homme blessé s’enfuit avec un enfant à l’allure de vieillard, poursuivi par l’armée. L’homme blessé sera abattu d’une bonne trentaine de balles dans un plan sans complaisance, à la limite du gore. Mais l’enfant arrive à s’enfuir, après avoir fait exploser toutes les vitres des immeubles adjacents.

 

Akira est somptueux visuellement, truffés de détails, telles les traînées des phares des motos…

 

Retour sur l’affrontement entre les Clowns et les Capsules. Alors que Tetsuo défait le dernier Clown, Takashi (l’enfant à l’allure de vieillard) surgit devant lui, Tetsuo le percute violemment et est grièvement blessé, Takashi n’ayant rien (ayant crée comme une bulle de protection autour de lui). L’armée arrive, embarque Tetsuo tandis que Kaneda et ses amis sont emmenés au commissariat.

 

L’institution où sont placés Kaneda et sa bande. Une école de rêve…

Alors que la bande de Kaneda retourne en « institution », l’armée commence à faire des expériences et tests sur Tetsuo. Il semblerait que son « contact » avec Takashi à réveillé en lui un don de psychokinésie qui leur rappelle Akira. L’armée le modifie, ayant toujours un projet top-secret visant à former des personnes possédant des pouvoirs psychiques.

 

Tetsuo réussit à s’enfuir et tente de voler la moto de Kaneda. La bande le rattape, mais Tetsuo a bien changé. Il est devenu violent, imprévisible et veut prouver que ce n’est pas le raté ou minus qu’ils croient. Mais l’armée remet la main sur lui pour continuer les expériences.

 

Le film était visionnaire, puisque les jeux olympiques de 2020 auront effectivement lieu à Tokyo

Kaneda veut sauver Tetsuo qui est un ami d’enfance et à travers Kei (une fille rencontrée au commissariat pour qui Kaneda a le béguin), il intègre un groupe antigouvernemental qui veux en savoir plus sur le projet Akira, ce qui se trame à travers Tetsuo et le libérer.

 

Mais les pouvoirs de Tetsuo ont grandement augmentés, ce sentiment de toute puissance le rend extrêmement violent, arrogant et incontrôlable. Depuis le début des expériences sur lui, Tetsuo est sujet à de fortes migraines et entend tout le temps le nom Akira dans sa tête, qui serait plus puissant que lui. Il décide de retrouver Akira, qui serait sous le stade olympique de Tokyo. Devenu hors de contrôle et mégalo, enivré par sa puissance, il détruira tout et tuera tous ceux qui lui barrent la route, y compris ses amis.

 

Vous avez réussi à suivre ? Parce que là, je ne vous ai raconté que la moitié du métrage, en omettant beaucoup de choses. Akira est très riche et même difficile à suivre, au point que 2 ou 3 visionnages sont conseillés pour bien le comprendre.

 

Un des plans iconiques de l’anime…

 

Bon, avant tout, il faut savoir qu’Akira n’est pas un animé pour enfants (il me semble qu’il est interdit au moins de 12 ans). Il est violent, sans concessions, abordant des thématiques complexes et profondes qui s’adressent à un public mature. A travers son œuvre, Katsuhiro Otomo dresse un portrait au vitriol de la société japonaise.

 

Une secte verra même en Akira un nouveau dieu…

Sous un film cyberpunk, on y voit la jeunesse totalement écrasée par la société (et ses conséquences), une critique de la société de consommation où les quartiers les plus opulents (buildings, néons) côtoient les plus délabrés, la corruption des politiciens qui ne pensent qu’à leur profit, les laissés pour compte livrés à eux-mêmes, ce qui arrive lorsqu’on confie de grands pouvoirs à quelqu’un ayant un complexe d’infériorité, etc. Et à tout cela s’ajoute également des groupes antigouvernementaux, les émeutes, et même une secte voyant en Akira un nouveau dieu, etc…

 

 

Comme dit en préambule, Akira est tiré du manga du même nom et c’est Katsuhiro Otomo, son auteur, qui a également réalisé le film. Fait intéressant, le manga n’était pas encore terminé lorsque le film est sorti, ce qui fait que malgré une base assez proche, le manga et le film ont des histoires et une fin différentes, la seconde partie de l’histoire étant absente du film (puisque publiée après sa sortie).

 

Je l’avais dit en préambule, mais encore en 2019, Akira reste toujours une prouesse visuelle (au niveau graphique et de l’animation) que même des productions récentes ont du mal ne serais-ce qu’à égaler. Et à l’heure de l’animation 3D, Akira est réalisé en 2D, (hormis le plan de « l’aura » de Tetsuo, le seul réalisé sur ordinateur) tous les décors étant faits à la main! Ils fallu plus de 160’000 celluloids, 327 couleurs (dont une cinquantaine créées pour le film !), 4 ans de travail et un budget de 11 millions de dollars (l’anime le plus cher produit à l’époque) pour le réaliser !

 

Akira est toujours aussi impressionnant 31 ans après sa sortie…

 

Pour la musique, elle est composée par Shoji Yamashiro et interprétée par le collectif Geinoh Yamashirogumi, aussi appellé Les tambours de Kodo. La musique est difficile à décrire, mélange de chants bouddhistes, de synthétiseurs, de musique traditionnelle japonaise et de percussions hypnotiques. On pourrait croire en lisant ceci que la musique n’est pas en accord, mais bizarrement, elle colle parfaitement à l’atmosphère du film et reste une de meilleures B.O. qu’il m’ait été donné d’entendre. Regardez l’extrait où la bande annonce pour vous faire une idée, et vous verrez.

 

 

Mais bon, Akira n’est pas parfait. Rien à redire techniquement parlant, cela reste impressionnant. Mais l’histoire est difficile à suivre, un seul visionnage ne sera probablement pas suffisant pour tout comprendre, d’autant plus si vous n’avez pas lu le manga (ce qui fut mon cas). Il y a énormément de thèmes abordés, peut-être trop, donnant parfois un coté foutraque à l’ensemble.

 

Akira n’est pas un blockbuster popcorn, il demande un investissement de votre part. Mais il en  vaut vraiment la peine. Un peu comme Blade runner, si vous cherchez un film cyberpunk avec beaucoup de thèmes abordés.

 

Bien qu’amis d’enfance, Kaneda et Tetsuo vont devoir s’affronter…

Et bon, j’étais obligé de parler de la fin d’Akira, très obscure, qui a fait couler beaucoup d’encre, un peu comme la fin de 2001, l’odysée de l’espace. Une comparaison qui n’est pas anodine, les 2 films parlant (à demi-mot) de l’évolution humaine. Rappelez-vous la discussion entre Kaneda et Kei à propos de « l’amibe » si vous avez un doute. Et personnellement, je ne m’en étais pas rendu compte au premier visionnage.

 

Hormis le problème d’une histoire très complexe, un autre problème vient de la version française. Rien à dire concernant le doublage, ce sont des voix connues, ils font bien leur job, c’est la traduction. On remarque que certaines répliques tombent comme un cheveu sur la soupe, ou ce qu’ils disent manque de sens par rapport à la scène. Déjà que l’histoire n’est pas facile à suivre… Je pense qu’ils en étaient conscients, car pour la sortie d’Akira en bluray en 2011, la version française a été refaite, avec une partie du casting d’origine.

 

Vous ne rêvez pas, un passionné à recréé la moto de Kaneda. Cliquez sur la photo pour la voir rouler. Prix: 121’000 $!

Akira est un film qui a marqué son époque. Regardez Ghost in the shell (l’anime) ou Matrix, ils ont été clairement influencés par Akira. Et la mythique moto de Kaneda est passée à la postérité au point qu’on peut la voir dans Ready Player One de Steven Spielberg.

 

Enfin, très récemment, on a annoncé la mise en chantier d’une version « live » d’Akira, réalisée par Taika Waititi et produite par Leonardo di Caprio et dont l’histoire se déroulerait à Neo-Tokyo en 2060. Mais 8 semaines avant le début du tournage, le film est mis en stand-by, Taika Waititi devant auparavant réaliser Thor 4 ! Donc inutile de l’attendre avant 2022. Espérons si le film sort (ce qui n’est pas sûr) qu’ils ne feront pas la même chose que pour le film live de Ghost in the Shell, où le coté visuel est préservé, mais un film sans âme, avec un scénario simplifié et ou tout le coté philosophique est passé à la trappe.

 

Pour conclure, Akira est un film qui a marqué l’histoire de l’animation. Un anime qui a demandé un travail titanesque et qui en 2019 reste toujours aussi impressionnant techniquement. Akira est un film difficile, dans le sens ou il demandera un investissement (et probablement plusieurs visionnages) pour le comprendre et l’apprécier, avec plusieurs niveaux de lecture.

 

C’est une expérience unique, l’anime est violent, poétique, visionnaire, philosophique, intelligent mais, surtout, excellent. Un must du cyberpunk exigeant, à voir au moins une fois dans sa vie.

 

Hidalgo

 

Extraits vidéo :

 

Bande annonce

Extrait: début de la poursuite en moto fr

 

Akira

 

Sortie:                             1988 (Japon), 1989 (USA), 1991 (France)

Durée:                             124 minutes

Genre:                             Anime / seinen  science-fiction cyberpunk

 

Pays:                               Japon

 

Réalisation :                    Katsuhiro Otomo

Production :                     Akira Comitee (Kôdansha, Toho, Tokyo Movie Shinsha et bcp d’autres)

Distribution :                    Toho (Japon), Streamline Pictures (USA), UGC (France)

Scénario :                        Katsuhiro Otomo et Izo Hashimoto

 

Acteurs principaux (voix fr): Mathias Kozlowski (Kaneda), Barbara Tissier (Kei), Alexandre Gillet (Testuo), Pierre Hatet (Colonel), Pierre Tessier (Kaisuke)

 

Budget :                           11’000’000 $

Recettes mondiales:        80’000’000 $

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