Grave (2016) * *

Avant de parler de Grave, un film d’horreur français à ne vraiment pas mettre entre toutes les mains vu son sujet (le cannibalisme), je vais faire une longue intro et parler du cinéma français à l’heure actuelle. On peut me traiter de vieux con, adepte des « C’était mieux avant ! », mais selon moi, le cinéma français se meurt. Oui, c’est une phrase choc, mais aussi un triste constat.

Julia Ducournau

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Citez-moi 10 chefs d’œuvres français sortis ces 10 dernières années. Vous pouvez ? Non ? La France, c’était la nouvelle vague, des polars prestigieux, des comédies vraiment drôles et variées, des films classiques maîtrisés, des références mondiales (un peu comme le cinéma italien, qui a connu le même sort, mais je m’égare), etc…

 

Depuis 20 ans, le cinéma français « populaire » se limite presqu’exclusivement aux comédies ou aux films d’action nazes et sans âme, ce genre de films dont Luc Besson a torché le scénario en 1 mois. Certes, il y a toujours de très bons films de tous types, mais ils se font rares et on est très loin de la diversité et de la qualité qu’il y avait auparavant, avec toutefois des bonnes surprises, comme Les misérables en 2019.

 

Le plus gros succès français de l’année, seulement 4e…

On peut établir ce constat également avec les résultats au box office français en 2019. Sur les 20 premiers films, seuls 3 sont français : Qu’es-ce qu’on a encore fait au bon dieu (4e), Nous finirons ensemble (12e) et Hors normes (20e). C’est clair qu’avec des chiasses comme Alad’2, on ne vend pas du rêve (mais 2,5 millions d’entrées quand même pour cette insulte cinématographique !).

 

Bref, cette longue intro avait pour but de dire que vu le contexte actuel, la sortie de Grave, un film d’horreur français, avec un sujet sensible, qui plus est réalisé par une femme, cela tient du miracle ! Je devrais plutôt dire franco-belge, car la moitié des capitaux sont belges et le film a été tourné à Liège. Et comme il avait des critiques plutôt positives, je me suis laissé tenter.

 

Justine et Adrien

Justine (Garance Marillier) fait partie d’une famille végétarienne. Surdouée, elle intègre à 16 ans une école vétérinaire, où étudie sa sœur Alexia (Ella Rumpf) et où ses parents se sont connus. Elle partage sa chambre avec Adrien (Rabah Naït Oufella), qui est gay.

 

A peine arrivés, un bizutage assez poussé et cruel débute pour les nouveaux venus, devant obéir, ramper, marcher en rang, être éclaboussée de sang, etc.

 

Lors d’un rituel, Justine doit manger un rein de lapin. Etant végétarienne, elle refuse. Mais sa sœur, qui fait partie des bizuteurs, nie qu’elle est végétarienne, et la force à manger un rein de lapin.

 

 

Bon appétit!

Cela va avoir des conséquences inattendues, car son corps va se couvrir de plaques d’eczéma. La doctoresse lui prescrit une crème et lui enlève les bouts de peaux mortes (assez dégueu !).

 

Je vous épargne la suite…

Mais l’eczéma n’était que le premier symptôme, car très vite, Justine commence à changer. Elle maîgrit, devient plus agressive et commence à avoir des envies de viande, volant un steak à la cantine ou mangeant du blanc de poulet cru. De plus, elle vomit beaucoup de cheveux (scène dégueu) et commence à avoir une pilosité excessive.

 

Alexia décide de lui épiler le maillot à la cire. Justine crie de douleur et en faitant un geste brusque, elle sectionne net un doigt d’Alexia ! En attendant l’ambulance, sa sœur évanouie, Justine s’empare du doigt d’Alexia et, après un moment, commence à le dévorer ! Justine a goûté à la chair humaine, et elle a aimé…

 

 

 

 

 

 

 

On n’en dira pas plus de l’histoire, mais pour ceux qui veulent voir Grave, je préviens que c’est un film à réserver à un public très averti. Des personnes se sont évanouies en le regardant, et on a distribué des sacs à vomi dans plusieurs salles, donc soyez prévenus. Le film a été très bien reçu par la critique, mais j’en ai pensé quoi finalement ? Et bien, malgré d’indéniables qualités, j’ai été déçu. En fait, je m’attendais à mieux.

 

Parmi les bons points, l’histoire est très originale, avec de nombreux rebondissements. C’est un film viscéral, qui va vraiment loin, marquant et malsain, tout en faisant réfléchir avec les scènes de « transformation » de Justine, plutôt glauques, ou le bizutage poussé que subissent les nouveaux arrivés.

 

Les scènes gores sont peu nombreuses (ce n’est Hostel), plus suggéré que montré, mais elles sont bien réalisées et très malsaines. Et ces scènes ne sont jamais gratuites.

 

Grave n’est pas juste un film d’horreur malsain, il se permet également de dénoncer le bizutage, un thème largement tabou, qui malgré son interdiction, est toujours pratiqué et provoque des dérives chaque année.

 

Ensuite, le cannibalisme de Justine peut aussi être vu comme une métaphore par rapport au passage à l’âge adulte, à l’éveil à la sexualité (Justine étant vierge), voir de réussir à trouver sa place dans la société.

 

Et que dire de la prestation de Garance Marillier ! Elle n’avait que 16 ans pour le rôle extrême de Justine, et elle est franchement épatante et très convaincante. Elle a une large palette de jeu, et on suit son évolution. De gentille surdouée au début, son attitude se « zombifie » au fur et à mesure du film. J’ai hâte de suivre la suite de sa carrière, contrairement aux autres acteurs, nettement moins bons, voir mauvais.

 

Pour la réalisation, c’est nettement plus mitigé. Oui, le film est malsain, oui, les scènes chocs sont réussies, mais que c’est plat ! Le film est très peu stylisé, hormis quelques scènes comme le plan séquence en boîte de nuit.

 

Presque tout est filmé caméra à l’épaule, les plans en extérieur sont en lumière naturelle, donnant un coté grisâtre au film. On pourra me rétorquer que cela participe au coté glauque et malsain du film, ce qui n’est pas totalement faux.

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De plus, il y a plusieurs scènes où je n’ai pas compris où Julia Ducournau voulait en venir. Par exemple, celle du chien autopsié où le drap se retire tout seul. Ou quand Justine et Adrien vont dans une station-essence, car Justine ne veut pas qu’on la voie manger du jambon (au lieu de fermer sa chambre à clé), avec Adrien qui est accosté par un routier très louche. Et enfin quand Justine et Alexia pissent debout.

 

Il y a d’autres scènes de ce type, et je ne vois pas ce que cela apporte au film. Ou alors, cela m’a échappé. Quant à la fin, sans spoiler, c’est vraiment gros, Justine n’avait jamais vu ses parents (vous comprendrez en regardant) ?

 

Pour conclure, même si Grave a reçu de très bonnes critiques, il m’a laissé sur ma faim (gag !). Grave est un film imparfait selon moi, qui vaut surtout la performance de Garance Marillier, de nombreux rebondissements (certains malvenus), la manière dont le sujet est traité, de bons effets spéciaux et l’ambiance glauque et malsaine que dégage le film.

 

Et contrairement au très décevant Martyrs, il le fait sans scènes gratuites. Pour les amateurs de films de genre français, on peut aussi citer Dans ma peau et Trouble every day, qui traitent aussi de cannibalisme et qui sont également à réserver à un public très averti, à déconseiller aux âmes sensibles.

 

Hidalgo

 

Extraits vidéo :

 

Bande annonce fr

Extrait: bizutage (rein de lapin) fr

 

Grave

 

Sortie:               2016

Durée:               98 minutes

Genre:               horreur

 

Pays:                 France / Belgique

 

Réalisation :      Julia Ducournau

Production :       Jean des Forêts

Distribution :      Wild Bunch

Scénario :          Julia Ducournau

Musique :          Jim Williams

 

Acteurs principaux:     Garance Marillier (Justine), Ella Rumpf (Alexia), Rabah Naït Oufella (Adrien), Joana Preiss (mère), Laurent Lucas (père)

 

Budget :             3’800’000 $

Recettes :          3’096’815 $ (hors festivals)

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